L'orient le jour
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Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes
12/07/2005
Communiqué de presse FEM/1514 |
Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
691e & 692e séances – matin & après-midi
DE NOMBREUX EXPERTS REGRETTENT L’ABSENCE DE PROGRÈS AU LIBAN EN FAVEUR DES FEMMES
Examinant le rapport initial et le deuxième rapport périodique du Liban sur la situation de la femme, de nombreux experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) ont estimé insuffisants les efforts du Gouvernement libanais à l’égard de la défense des droits des femmes, même si l’experte de l’Algérie a tenu à mettre l’accent sur les difficultés d’un pays où la vie économique et sociale s’est arrêtée entre 1973 et 1991. Des experts ont notamment suggéré une réforme du Code pénal libanais qui sanctionne les violences domestiques.
L’experte du Bénin aconstaté que les rapports présentés par le Liban montraient en quelque sorte une attitude permissive de la part du gouvernement envers les entraves à la Convention. Elle en a appelé à une politique plus affirmée de la part du Gouvernement. Elle a affirmé que la nuance subtile faite dans les rapports entre la reconnaissance par la Constitution libanaise de l’égalité entre tous les citoyens devant la loi et l’absence de tout texte spécifique la gênait. Il s’agit pour elle d’une forme d’ouverture à la discrimination, « il y a comme un ver dans la pomme », a-t-elle déclaré « car notre seul interlocuteur est le Gouvernement ». L’experte de l’Algérie a exhorté le Gouvernement libanais à agir au plus vite pour rattraper son retard car,
a-t-elle rappelé, «quand les femmes avancent, c’est tout le pays qui avance».Le Liban, qui a ratifié la Convention en 1996 mais qui, à ce jour, n’a pas ratifié le Protocole Facultatif, a présenté ce matin son rapport initial(2000) et son deuxième rapport (2005) par la voix de Mme Leila Azouri, membre de la Commission nationale pour la femme libanaise.
Le Liban a émis des réserves quant à trois articles de la Convention, dont l’article 16 qui a trait au mariage et à la famille, les libanais étant soumis à des lois confessionnelles différentes. Le Liban a également exprimé des réserves à propos de la disposition relative à la nationalité au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention et à propos du paragraphe 1 de l’article 29.
Dans le cadre des remarques de clôture, l’experte des Philippines et Présidente du Comité, Mme Rosario G. Manalo, a notamment inviter le Gouvernement libanais à ratifier le protocole facultatif à la Convention et à lever les réserves formulées à l’égard des articles 9, 16 et 29. Elle a regretté la persistance de stéréotypes forts et d’une violence à l’égard des femmes considérées comme un phénomène normal de la sphère privée en suggérant au Liban d’y faire face par le biais d’une loi sur la discrimination et une formation du personnel du système judiciaire.
En outre, elle a mis l’accent sur la nécessité de mesures temporaires spéciales, qu’elle a définies comme le seul moyen d’assurer une présence conséquente des femmes dans la vie politique et publique, en notant l’urgence de traduire les bonnes intentions libanaises en actes en matière de promotion de la femme.
La représentante de la délégation libanaise a estimé qu’il fallait encore du temps au pays afin d’éliminer toute forme de discrimination contre les femmes, notamment en raison de la persistance de coutumes et des traditions discriminatoires.
Les membres de la CEDAW poursuivront leurs travaux demain matin mercredi 13 juillet à 10 heures avec l’examen des quatrième et cinquième rapports combinés de la République d’Irlande (CEDAW/C/IRL/3-4).
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES
Rapport initial et deuxième rapport combiné du Liban (CEDAW/C/LBN/1 et CEDAW/C/LBN/2)
Le Liban a ratifié la Convention en 1996 et à ce jour, n’a pas ratifié le Protocole Facultatif.
Législation
La Constitution Libanaise ne proclame pas explicitement l’égalité entre les hommes et les femmes comme le font la plupart des autres Constitutions et comme l’exige la Convention mais elle reconnaît l’égalité absolue de tous les citoyens devant la loi. Principal organe de défense des droits des femmes la Commission nationale pour la femme libanaise a été créée en 1998, en application des textes issus de la Conférence de Beijing. Mais son rôle demeure un rôle consultatif.
Le Liban a exprimé des réserves à propos de l’article 16 de la Convention qui a trait au mariage et à la famille. Cette réserve tient au fait que les Libanais ne sont pas soumis à une seule loi concernant leur statut personnel, mais que chaque libanais est soumis aux lois et aux tribunaux de sa communauté confessionnelle.
Le Liban a également exprimé des réserves à propos de la disposition relative à la
nationalité au paragraphe 2 de l’article 9 de la Convention. La législation libanaise stipule que la nationalité d’un enfant est transmise par le père.
Le Liban a aussi exprimé des réserves à propos du paragraphe 1 de l’article 29 qui déclare que tout différend entre deux ou plusieurs États parties sera réglé par voie de négociation et ne sera pas soumis à l’arbitrage ni à la Cour internationale de justice. Suite à la signature de la Convention, un seul amendement mineur a été porté alors que plusieurs lois sont iniques à l’égard des femmes, lois qui doivent être amendées pour réaliser l’égalité requise par la Convention.
Le Code pénal libanais contient des dispositions discriminantes envers les femmes:
a) Crimes d’honneur
Quiconque surprend son épouse, ou un de ses ascendants ou descendants ou sa soeur commettant l’adultère ou un rapport sexuel illicite ou dans une situation apparemment compromettante, et qui blesse ou tue l’un d’eux sans préméditation, sera jugé au bénéfice de circonstances atténuantes.
b) Adultère
Une femme est condamnée pour adultère que l’acte ait lieu au domicile conjugal ou à tout autre endroit, tandis que l’homme ne le sera que s’il commet l’adultère sous le toit conjugal ou s’il entretient ouvertement une maîtresse. Mais les dispositions du code pénal libanais concernant l’adultère font actuellement l’objet d’un réexamen détaillé.
c) Avortement
La législation libanaise interdit l’avortement et n’autorise l’interruption de grossesse exclusivement pour des raisons médicales dans des conditions spécifiquement déterminées.
d) Atteintes à l’honneur
Certains articles du Code pénal exposent les femmes à la violence conjugale, sexuelle et psychologique.
e) Prostitution
La loi détermine les conditions d’ouverture de maisons de prostitution et interdit formellement la prostitution clandestine. Elle sanctionne l’incitation à la débauche, l’homosexualité et quiconque séduit une femme ou une mineure. Le Liban a signé le Protocole de Palerme qui prévient et sanctionne la traite des êtres humains, en réprimant notamment les clients.
Les femmes sont en revanche traitées sur un pied d’égalité avec les hommes dans le domaine juridique, en particulier en ce qui concerne leur capacité juridique et la gestion de leurs biens.
Violences
Étant donné l’absence de mécanismes officiels, institutionnels et sociaux qui permettraient de s’attaquer au problème de la violence, le Conseil libanais de lutte contre la violence faite aux femmes organise diverses réunions consultatives avec des personnalités religieuses responsables pour essayer d’élaborer des projets de loi sur la protection de la famille contre la violence, en étroite coopération avec un certain nombre de juges civils et religieux.
Stéréotypes
Dans la coutume en vigueur, l’homme continue d’être désigné comme chef de famille. Les stéréotypes relatifs aux hommes et aux femmes dans l’enseignement et les médias s’atténuent. Toutefois, les principales caractéristiques de ces stéréotypes persistent, et les mesures pour les réduire sont soit inexistantes soit insuffisantes.
Éducation, emploi et vie économique
Les taux d’inscription scolaire et universitaire des femmes ont fortement augmenté, dépassant parfois ceux des hommes. Le pourcentage de femmes exerçant une activité économique par rapport au nombre total de femmes est passé de 9,5 % en 1970 à 14,7% en 1997. La plus grande part de cette amélioration tient davantage à des facteurs démographiques qu’à un plan de développement bien défini avec des objectifs précis ou à une sensibilisation générale de la société due à un meilleur niveau d’instruction, à un changement relatif des attitudes à l’égard du travail des femmes et aux séquelles de la guerre dévastatrice qui a sévi au Liban.
En raison de la baisse du taux d’analphabétisme des femmes, leurs activités
sont aujourd’hui plus diversifiées que dans les années 70. Malgré l’amélioration du travail des femmes qui se traduit par leur participation accrue aux activités économiques entre 1970 et 1997, leur situation a à peine changé.
Le licenciement ou la menace de licenciement d’une femme durant la période de grossesse sont interdits, sauf s’il est établi qu’elle était employée ailleurs durant cette période. Le Code du travail interdit l’emploi des femmes dans les industries et emplois susceptibles de nuire à leur santé, à celle du foetus si la femme est enceinte et à la santé de ses enfants.
Toutefois, en 2000, la disposition de l’article 26 de la loi sur l’emploi qui interdisait le travail de nuit des femmes dans toutes les industries mécaniques et manuelles a été abrogée et remplacée par une nouvelle disposition qui interdit expressément toute discrimination fondée sur le sexe entre les salariés pour ce qui concerne le type de travail, le montant de la rémunération, le recrutement, la promotion, la formation professionnelle et la tenue vestimentaire. Concernant le congé de maternité, en 2000, l’article 29 de la loi sur l’emploi a été modifié pour porter la durée du congé de maternité de 40 jours à plein salaire à sept semaines également à plein salaire, périodes pré et postnatale comprises. Mais, en dépit de ce progrès, la durée du congé de maternité demeure inférieure à celle prévue dans la Convention de l’OIT sur la protection de la maternité, que le Liban n’a pas ratifiée et qui stipule que cette durée ne doit pas être inférieure à 12 semaines, dont au moins six après l’accouchement.
Représentation politique
Aucune femme n’a jamais occupé les fonctions de Président de la république, de Président de l’Assemblée Nationale ou de Premier Ministre. Aucun obstacle juridique n’empêche les femmes de participer à la vie politique. Mais depuis l’indépendance du pays, aucune femme n’a jamais exercé des fonctions ministérielles propres à renforcer son statut et sa contribution à la vie politique et ce jusqu’à la constitution du dernier Gouvernement, le 26 octobre 2004, qui compte une femme Ministre d’État et une autre Ministre de l’industrie, ce qui est considéré comme un pas dans la bonne direction.
Présentation par l’État partie
Mme LEILA AZOURI, membre de la Commission nationale pour les femmes libanaises et chef de la délégation, a affirmé que la signature de la Convention, malgré les quelques réserves émises sur certains articles, montrait les efforts faits par le Liban pour arriver à la parité entre hommes et femmes. Mme Azouri a affirmé que les femmes, sur le plan juridique, jouissaient des mêmes droits que les hommes. Quel que soit leur statut marital, elles ont le droit d’acquérir ou de modifier leur citoyenneté libanaise. Quant au travail et à la sécurité sociale, les lois ne font aucune distinction entre hommes et femmes. Certaines discriminations constatées ont été corrigées après l’an 2000, c’est-à-dire après la publication du rapport initial.
L’éducation est la même pour tous au Liban, a insisté Mme Azouri, constatant que les femmes étaient de plus en plus nombreuses dans le système scolaire, du primaire à l’université. Le système de santé est accessible aux femmes comme aux hommes, le taux de mortalité des femmes pendant les accouchements et des enfants en bas âge étant en diminution. Dans la période entre les deux rapports (2000-2005) une loi pour la défense des droits des handicapés, hommes et femmes, a été adoptée au Liban. Le deuxième rapport, a indiqué Mme Azouri, fait également part d’un nombre croissant de femmes dans le secteur politique, à tous les échelons de la représentation publique.
Concernant la Convention, elle a rappelé que le Liban avait des réserves limitées sur les articles 9, 16 et 29. De nombreux codes personnels existent au Liban (mariage, successions, etc.) et constituent un obstacle traditionnel à l’application de certains de ces articles, car ils reflètent l’identité confessionnelle des personnes. Mais des amendements apportés récemment à la Constitution libanaise prévoient de surmonter les tensions pour que petit à petit la société libanaise aille vers plus de modernité et pour que ces réserves soient un jour levées. Mme Azouri a mis en lumière le travail des ONG en coordination avec l’Etat pour y parvenir (lutte contre les violences à l’égard des femmes par exemple).
Au cours de ces derniers mois, le Liban a tenu des élections parlementaires et le nombre de femmes parlementaires a connu une hausse sensible, passant de 3 à 6. La représentante a affirmé que le nouveau Parlement libanais poursuivrait les travaux entrepris par le gouvernement précédent et modifierait ses réformes afin d’appliquer le f) de l’article 2(qui prévoit que l’Etat doit « prendre toutes les mesures appropriées pour modifier ou abroger toute loi, disposition réglementaire, coutume ou pratique qui constitue une discrimination à l’égard des femmes »). Ce que le Liban fait pour arriver à l’égalité est une œuvre de longue haleine, a-t-elle déclaré, et cela nécessite une conjugaison des efforts du Gouvernement et de la société civile.
Mme Azouri a conclu en soulignant que les guerres ont toujours fait obstacle aux efforts entrepris par le Liban pour faire progresser la condition de la femme et a affirmé que le gouvernement comptait accorder aux femmes toute l’attention qu’elles méritent.
Questions des expertes et dialogue avec le Comité
Mme NAELA MOHAMED GABR, experte de l’Égypte, et Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, experte de la Croatie ont demandé des précisions sur le projet de loi qui doit être adopté pour assurer l’égalité entre les hommes et les femmes et les moyens que le Liban souhaite mettre en œuvre pour aligner les lois sur les dispositions de la Convention. Elles ont demandé quels obstacles s’opposaient à la mise en œuvre de la parité et de l’égalité entre les sexes.
Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh, a rappelé que l’article 12 de la Convention prévoyait que le Gouvernement prenne sans délais des mesures visant à mettre un terme à la discrimination dont étaient victimes les femmes.
Mme ZOU XIAOQIAO, experte de la Chine, a demandé des précisions sur les initiatives du Gouvernement libanais pour favoriser la mise en œuvre de la Convention et quelles agences ou institutions gouvernementales avaient pour rôle de suivre cette mise en œuvre. Elle a demandé si le Gouvernement libanais avait l’intention de promouvoir cette Convention auprès du grand public et quel était le rôle des associations de femmes pour ce faire.
Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, s’est inquiétée de la persistance de stéréotypes dans la société libanaise en souhaitant des précisions sur les freins politiques toujours existant. Elle a également demandé des précisions sur l’implication des femmes à la promotion de la parité entre les sexes.
Mme FRANÇOISE GASPARD, experte de la France, a regretté que la délégation du Liban n’a pas parfaitement respecté les directives du Comité en matière de présentation de rapport. Elle a constaté un gouffre entre la position des femmes dans la société libanaise au niveau sociologique et leur rareté dans les instances de décisions, en notant qu’il n’y avait que 4,6% de femmes au sein du Parlement. Elle a demandé si les événements récents permettaient d’espérer une évolution au regard des droits civils des femmes, notamment en matière de mariage civil. Alors, que la République se déclare démocratique, elle a souligné qu’une démocratie sans la participation des femmes demeurait une démocratie incomplète.
La représentante de la délégation a indiqué que même si la majorité des membres du Conseil des ministres étaient favorable à l’adoption d’une nouvelle loi sur la parité entre les sexes, la spécificité de la société libanaise a fait que ce projet n’a pu être adopté à ce jour. Elle a estimé que, sans cette guerre tragique commencée en 1975, la société libanaise aurait été bien différente, en rappelant que dès 1972 le Liban avait adhéré à deux pactes internationaux. Elle a reconnu que le Liban avait en fait régressé avec la guerre, en reconnaissant que le Code du statut personnel n’avait pas évolué depuis 1936. Elle a précisé que les dispositions constitutionnelles primaient sur toutes autres dispositions juridiques ou législatives. Même si la Constitution libanaise ne proclamait pas explicitement l’égalité entre les hommes et les femmes, elle a précisé que son préambule contenait une référence à la Charte des Nations Unies et à la Déclaration des droits de l’homme. Elle a souligné les efforts de l’Université du Liban et des Facultés de droits sur le thème de l’intégration de la CEDAW dans le droit libanais. Elle a précisé que les enfants, au Liban, étaient sensibilisés au contenu de la Déclaration des droits de l’homme et des dispositions complémentaires dès l’âge de 10 à 11 ans.
La représentante de la délégation libanaise a reconnu que la forme pour établir le rapport initial ne correspond pas aux recommandations du Comité. En revanche, elle a affirmé que le deuxième rapport s’y conformait mieux et s’est engagée à ce que le prochain rapport suive de plus près les recommandations. La majorité des femmes qui ont rédigé les rapports sont des femmes activistes et militantes faisant partie de la société civile.
Engageant une deuxième série de questions, l’expert des Pays-Bas,
M. CORNELIS FLINTERMAN, a demandé des précisions sur la répartition des pouvoirs entre le Conseil constitutionnel et le Conseil consultatif. Les juristes, les tribunaux, connaissent-ils les obligations du Liban envers la Convention? Il a demandé s’il y a eu un programme de formation à ce sujet Les droits de l’homme sont inclusifs, ceux des femmes aussi, a-t-il rappelé. Quelle est la politique du Gouvernement pour éliminer les dispositions afin de lutter contre les discriminations envers les lesbiennes?L’experte de la République de Corée, Mme HEISOO SHIN, a demandé si, au Liban, une femme peut porter un cas devant le Conseil constitutionnel. Rappelant que les rapports du Liban sont en retard, elle a suggéré par ailleurs que les troisième et quatrième rapports soient combinés lors de la prochaine présentation, c'est-à-dire en 2009. Elle a suggéré de consulter et de travailler en coopération avec la société civile, notamment les ONG féminines pour qu’elles fassent leurs commentaires.
L’experte de l’Allemagne et Vice-Présidente du Comité, Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, a demandé si la délégation libanaise connaissait les déclarations du Comité concernant les réserves à l’article 16 qui vont, selon ces déclarations, à l’encontre de la Convention. Elle a demandé s’il y a eu des effets négatifs de ces réserves envers les femmes notamment concernant l’accès aux soins ou à l’éducation ?
L’experte du Brésil et Vice-Présidente du Comité, Mme SILVIA PIMENTEL, a déploré qu’il n’existe pas de loi au Liban contre les violences faites aux femmes au sein de la famille. Elle a voulu connaître les mesures législatives que le Gouvernement libanais a l’intention de mettre en place pour pallier ce manque. Elle a jugé important d’annuler des articles de la loi libanaise comme celui concernant la répression des relations sexuelles entre les personnes du même sexe et l’article reconnaissant les crimes d’honneur.
L’experte de l’Italie, Mme TIZIANA MAIOLO a voulu savoir où en était l’abolition du confessionnalisme politique afin de parvenir au Liban à un véritable Etat laïque. Elle a également demandé où en était la réforme législative concernant notamment les crimes d’honneur et l’adultère.
La Présidente du Comité et experte des Philippines, Mme ROSARIO G. MANALO a voulu connaître l’état des relations entre le Conseil consultatif libanais et le Conseil constitutionnel. Une décision peut-elle être prise par le Conseil constitutionnel et peut-on ensuite faire appel devant le Conseil consultatif ?
Répondant à cette série de questions, la représentante de la délégation libanaise a apporté des précisions sur les différences entre le Conseil constitutionnel et le Conseil consultatif. Elle a précisé que le Conseil consultatif, en tant que première autorité législative, pouvait être comparé au Conseil d’État français, dans le sens où il n’annulait pas les textes législatifs mais les textes exécutifs. Quant au Conseil constitutionnel, il peut annuler les dispositions législatives non conformes à la constitution. Elle a précisé que les chefs religieux et les chefs de groupes religieux avaient le même pouvoir que le Président du Liban en ce qui concerne la saisine du Conseil constitutionnel pour vérifier la conformité d’un texte de loi avec la Constitution.
Répondant aux inquiétudes de certaines expertes sur les réserves formulées par le Liban à l’égard de l’article 9 de la Convention demandant aux États parties d’accorder aux femmes des droits égaux à ceux des hommes en ce qui concerne l’acquisition de la nationalité, elle a précisé qu’il n’y avait ni effet négatif de la nationalité sur l’aide médicale, ni discrimination concernant la scolarisation d’enfants de mère non libanaise. Elle a ajouté que les enfants dont la mère était libanaise avaient néanmoins la priorité pour obtenir un permis de travail. Elle a estimé que le dialogue entre la communauté internationale, la société civile et les différentes confessions était vivant et donnait beaucoup d’espoir.
S’agissant de la violence domestique, une représentante de la délégation a souligné la volonté du Gouvernement libanais de mettre en place une législation visant à dissuader les auteurs de ces actes de violences en prévoyant des peines pour les responsables de tels actes. Il existe divers programmes, a-t-elle précisé, ayant pour but de combattre les violences à l’égard des femmes dans notre société. Elle a reconnu la nécessité de prendre des mesures qui deviendraient partie intégrante de la loi et pourraient être intégrées à terme dans la Constitution. Elle a précisé que le nombre de plaintes avait augmenté montrant que les femmes n’avaient plus peur de faire ce pas et que cela avait entraîné une baisse de la violence. Parce que les femmes n’ont plus peur de porter plainte, les actes de violence ont baissé de 75% en quatre ans. Mais la possibilité de plainte, n’est pas suffisante sans l’avènement d’une législation prévoyant de sanctionner les auteurs de violence à l’égard des femmes.
En ce qui concerne les crimes d’honneur, les hommes ne pourront profiter d’aucune circonstance atténuante, a assuré la représentante de la délégation, avant d’ajouter : « nous ne baisserons pas les bras tant que nos amendements ne seront pas pris en compte par le Comité parlementaire pour la justice dans la réforme du Code pénal ».
Concernant l’article 3, experte du Bangladesh, a demandé des précisions sur le rôle de la Commission des femmes libanaises créée en 1998 dans le but d’assurer le développement des femmes. Elle a souhaite connaître le processus de choix des membres de cette Constitution et comment les 18 différents groupes ou confessions étaient représentés et avoir des précisions sur les crimes d’honneur commis par les frères, en s’inquiétant de la discrimination régnant au sein des familles.
L’Égypte, a demandé si les hommes étaient actifs dans les mécanismes visant à appuyer les droits des femmes et quels étaient les éléments principaux de la stratégie gouvernementale pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes dans les domaines de la vie économique et sociale, pour lutter contre les stéréotypes et améliorer l’image et la condition de la femme.
L’experte de la République de Corée a jugé insuffisantes et trop lentes les évolutions de la société libanaise à l’égard des femmes. Elle a donc demandé si le Liban avait un plan d’action national pour réaliser la parité, et si oui, quels en étaient les domaines prioritaires et les objectifs précis.
L’experte du Japon, Mme FUMIKO SAIGA, a demandé à qui la Commission nationale pour la femme libanaise envoyait ses recommandations et quel était son rôle exactement.
L’experte du Bénin, MmeHUGUETTE BOKPE GNACADJA, a constaté que les rapports présentés par le Liban consacraient en quelque sorte une attitude permissive de la part du Gouvernement envers les contraventions à la Convention. Elle en a appelé à une politique plus affirmée de la part du Gouvernement. Elle a affirmé que la nuance subtile faite dans les rapports entre la reconnaissance par la Constitution libanaise de l’égalité entre tous les citoyens devant la loi et l’absence de tout texte spécifique la gênait. Il s’agit pour elle d’une forme d’ouverture à la discrimination, « il y a comme un ver dans la pomme », a-t-elle déclaré « car notre seul interlocuteur est le Gouvernement ». De quelle marge le Gouvernement dispose-t-il, notamment par rapport à l’influence des communautés religieuses ? « Rassurez-moi sur la volonté politique du Gouvernement de faire avancer les droits des femmes», a-t-elle conclu.
L’experte de la Malaisie, Mme MARY SHANTHI DAIRIAM, a demandé s’il y avait au Liban une politique concertée pour assurer l’égalité des droits des femmes et s’il y avait un calendrier pour réaliser cette politique.
Répondant à la série de questions des experts sur l’article 3 de la Convention, la représentante de la délégation libanaise a expliqué que la Commission Nationale pour la femme libanaise n’était pas une émanation de la société civile : elle a été créée en 1994 afin de préparer la Conférence de Beijing, puis a été prolongée et elle est maintenant rattachée au bureau du Premier Ministre. Elle est constituée de personnes qui sont connues pour leurs activités en faveur des femmes, et la loi créant cette Commission prévoit que ses membres soient nommés par décret du Premier Ministre. Elle est composée de 24 membres dont la majorité sont des femmes qui ont des activités et une affiliation avec des ONG. Ses membres viennent de la société civile, il n’y a pas d’origine religieuse ou d’affiliation politique, a-t-elle affirmé, précisant cependant que son rôle était uniquement consultatif.
Elle a affirmé que le Liban avait un plan d’action, la Stratégie nationale pour les femmes, qui est un plan de travail pour la Commission nationale, élaborée après Beijing. Ce plan comprend 6 objectifs :
- parvenir à l’égalité complète dans la législation civile,
- assurer les droits fondamentaux des femmes dans le cadre des droits prévus dans la Déclaration universelle des droits de l’homme,
- donner aux femmes les moyens d’avoir une vie digne,
- développer les talents et les compétences des femmes pour parvenir à l’égalité des chances,
- avoir plus de femmes dans les structures de la vie publique,
- promouvoir la légalité de l’égalité dans la culture sociale et les modèles de comportement.
Cette stratégie a plusieurs objectifs sur le plan législatif, notamment le respect des pactes et conventions internationaux, la mise en oeuvre de nouvelles lois, la promotion des droits des femmes dans tous les textes législatifs et l’élimination des réserves émises sur certains articles de la Convention.
Elle a assuré le Comité de toute la bonne volonté du Gouvernement libanais pour réaliser tous ces objectifs. Mais elle a estimé qu’il restait beaucoup à faire et que le chemin serait long pour y parvenir.
Concernant l’article 5, Mme GLENDA P. SIMMS, experte de la Jamaïque, s’est interrogée sur les motivations réelles de la Commission nationale de la femme de défendre les droits de toutes les femmes. Elle a souligné la nécessité d’examiner les dimensions de classes, en précisant que ce sont d’abord les femmes les plus pauvres qui sont victimes de discriminations. Elle a rappelé que le Gouvernement libanais était responsable aussi des conditions de travail des étrangères et que la lutte contre la prostitution ne devait pas seulement s’adresser aux femmes mineures.
L’ experte du Japon, a souhaité des précisions sur le Conseil des médias, notant qu’il ne disposait d’aucun rôle de surveillance. Elle a demandé des précisions sur les initiatives du Gouvernement libanais pour lutter contre les stéréotypes.
Mme VICTORIA POPESCU, experte de la Roumanie, a regretté que l’application de l’article 5 de la Convention portant sur les stéréotypes soit encore très critique au Liban. Elle a regretté la persistance de mentalité patriarcale et de préjugés sexistes dans la vie publique et privée, notant l’impact des différentes coutumes religieuses. S’inquiétant d’une sorte de résignation et d’acceptation tacite de cette discrimination, elle a demandé comment le Gouvernement coopérait avec les ONG pour changer les conceptions sexistes de la société et quelle était sa réelle volonté de revoir les manuels scolaires pour promouvoir une vision égalitaire et moderne des femmes.
S’agissant de la violence à l’égard de la femme, Mme DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, a demandé si le Gouvernement accordait au Ministère des affaires sociales des moyens de fournir une protection et des services de santé aux femmes victimes de violences et s’il disposait de programmes de formation pour former les forces de l’ordre et le personnel des tribunaux aux besoins des femmes victimes de violence.
Mme KRISZTINA MORVAI, experte de la Hongrie, a demandé des précisions sur le nombre de femmes ayant trouvé la mort à la suite d’actes de violence domestique, le nombre de poursuite pénale par année contre les auteurs de telles violences et les systèmes de protection accessibles aux victimes.
En ce qui concerne l’article 6, Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a demandé des informations sur l’existence et l’ampleur du phénomène de la traite des femmes et les services de santé disponibles pour les victimes des proxénètes.
Répondant aux questions relatives à l’article 5, une représentante de la délégation libanaise à assurer des efforts du Gouvernement libanais pour intégrer la dimension sexospécifique dans les manuels scolaires par le biais de directives très claires aux établissements produisant ces manuels. Pour ce qui est de la violence, elle a précisé que les femmes militantes avaient été les premières à soulever ce problème auprès des ministères concernés et que la société civile était la première à avoir combattu ce phénomène dans les médias. Quant aux travailleurs migrants, a-t-elle ajouté, il existe un accord entre le Gouvernement et les ONG pour créer des refuges aux fins de la protection des femmes. Elle a précisé que la culture de la lutte contre la violence était une culture assez nouvelle qu’il était d’autant plus difficile à promouvoir que la violence au sein de la famille est souvent considérée comme une question privée qui ne peut être rendue publique.
L’experte de la Hongrie a demandé si la prostituée, et notamment la prostituée mineure, est pour le Gouvernement une délinquante.
Répondant aux questions des experts sur l’article 5, la représentante de la délégation a rappelé que les foyers secrets qui existent au Liban l’étaient afin de protéger les femmes et les enfants. Mais elle a mis en avant les obstacles rencontrés. Dans les médias, la femme est protégée mais certaines chaînes de télévision utilisent encore une image archaïque de la femme. Il y a tout de même une féminisation de l’information, et il y a beaucoup d’intérêt pour la dimension sexospécifique. Concernant les domestiques, le droit du travail, a-t-elle reconnu, ne couvre pas tous les secteurs. Il y en a au moins 3 qui ne sont pas couverts, notamment le secteur agricole et les employés de maison. Mais elle a affirmé que ces secteurs étaient régis par le droit civil. En 1983, la loi sur les urgences en matière de travail a été élargie, a-t-elle poursuivi. Tout ce qui peut atteindre un employé est couvert par ce nouveau texte.
Répondant aux questions sur l’article 6, la représentante de la délégationa rappelé que l’élément nouveau entre les 2 rapports, c’est la loi qui protège les délinquants mineurs alors qu’avant, ils étaient jugés en vertu du Code pénal. Après le rapport initial, une loi protégeant les mineurs, garçons et filles, a été votée et les protège notamment contre ceux qui les exploitent. Elle a donc espéré que dans le cadre de cette loi, les prostituées mineures ne soient pas poursuivies comme des criminelles mais qu’il y ait des mesures de prévention pour corriger la situation et non pas pour les punir.
Concernant les articles 7 et 8, l’experte de la Chine a estimé que le pourcentage de femmes au niveau de la prise de décision politique demeurait très bas. Le nombre de parlementaires femmes au Liban est l’un des plus bas du monde. Elle a donc demandé si le Gouvernement avait formulé des programmes à moyen ou long terme ou adopté des mesures temporaires spécifiques pour que ce nombre augmente.
L’experte de la Roumanie, s’est félicitée que la promotion de la participation des femmes à la vie politique et publique soit un objectif du Gouvernement libanais. Elle a regretté une importante sous représentation des femmes tant au niveau national que local dans le domaine politique, tout en notant qu’il y avait six femmes parlementaires depuis les dernières élections alors qu’il n’y en avait aucune auparavant. Elle a souhaité la mise en place de mesures spéciales provisoires pour encourager la participation des femmes à la vie politique, et notamment l’utilisation de quotas, qu’elle a défini comme d’autant plus indispensable que la société libanaise semble très marquée par les comportements sexistes. Elle a demandé des précisions sur la place des femmes dans les différents partis politiques, en s’inquiétant d’une diminution du nombre des femmes dans ces partis depuis les années 60.
L’experte de l’Algérie, Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, a salué la volonté et la persévérance des Libanais malgré les contraintes historiques d’un Liban qui a été marqué par de longues années de guerre et de destruction et qui souffrait toujours du poids de la dette. Tout en se félicitant que le Liban ait formé de nombreuses femmes universitaires, elle a regretté que ces dernières demeurent sous-représentées dans le monde politique, et la vie publique en général. Présentant la promotion de la femme comme le meilleur moyen de transformer le Liban, elle a exhorté ce pays à mettre en place des mesures temporaires spéciales pour favoriser la participation des femmes dans le monde politique, notamment par le biais de subventions aux partis politiques qui respecteraient des quotas de femmes.
L’experte de Cuba, Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, a demandé des précisions sur les facteurs favorisant la sous-représentation des femmes dans les assemblés politique, nationale et locale. Elle a estimé indispensable des stratégies et mesures concrètes qui permettraient aux femmes d’obtenir des postes non seulement lors des élections, mais aussi dans les postes de décisions de l’administration publique.
Concernant l’article 9, l’experte de la France, a demandé si une femme étrangère se mariant avec un libanais, ou un homme étranger se mariant avec une libanaise, pouvaient garder leur nationalité, et s’ils avaient la possibilité de transmettre leur nationalité à leur enfant, puisqu’il semble, au regard de la législation libanaise, que seul le père libanais peut transmettre sa nationalité.
M. CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas, appuyé dans ce sens par Mme DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, s’est demandé si les réserves formulées par le Liban sur l’alinéa 2 de l’article 9 étaient compatibles avec les buts et objectifs de la Convention. Il a noté que l’on pouvait difficilement comprendre pourquoi un État s’opposerait à accorder à la femme des droits égaux à ceux de l’homme, en ce qui concerne la nationalité de leurs enfants.
Répondant aux questions sur la représentativité de la femme dans la vie politique, une représentante de la délégation libanaise a indiqué qu’il ne fallait pas oublier que la vie politique et économique s’était arrêtée au Liban de 1973 à 1991. Elle a indiqué que la première mission du nouveau Parlement était de mettre au point une nouvelle législation relative aux élections, ce qui devrait permettre une participation plus importante des femmes. En ce qui concerne l’adoption de mesures temporaires, une représentante de la délégation a indiqué qu’une nouvelle loi électorale devrait permettre prochainement l’intégration d’un principe de quotas.
En réponse aux questions sur l’article 9 de la Convention, la représentante a précisé que quand un enfant est né hors mariage, il acquiert la citoyenneté de la mère, et s’il naît de parents inconnus, il se voit octroyer la citoyenneté libanaise.
Débutant une série de questions sur l’article 10, l’experte du Brésil et Vice-Présidente du Comité, Mme SILVIA PIMENTEL a demandé comment le gouvernement voulait structurer son plan « Education pour tous ».
L’experte de Cuba, Mme MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, a demandé des données concernant l’analphabétisme ventilées entre zones rurales et zones urbaines. Elle a voulu connaître également les mesures prises pour que les enseignants pénètrent dans les zones rurales. Elle a demandé s’il y avait des classes pour les femmes adultes.
L’experte de Maurice, Mme PRAMILA PATTEN, s’est inquiétée de l’absence de structures publiques pour la petite enfance et de la différence de coûts entre écoles privées et publiques, les parents choisissant d’envoyer en priorité les garçons à l’école privée en raison des coûts trop élevés. Y a-t-il des aides publiques pour améliorer la situation de la scolarisation des filles? Elle a également voulu connaître les mesures temporaires spécifiques, par exemple des systèmes de bourses pour les filles organisés par le Gouvernement pour faire disparaître les disparités entre les sexes.
Au sujet de l’article 11 de la Convention, l’experte du Bangladesh, Mme SALMA KHAN a constaté qu’au Liban, des stéréotypes lient les femmes à des secteurs économiques précis. Elle a souhaité connaître la structure des salaires dans le secteur privé. Elle a également demandé plus de détails sur les conditions de vie des travailleuses migrantes.
L’experte de Maurice a demandé ce que faisait le Gouvernement pour corriger les discriminations que rencontrent les femmes sur le marché du travail.
Répondant aux questions sur l’article 10, une représentante de la délégationa affirmé que des efforts ont été déployés pour élargir l’éducation sans discrimination aux zones rurales. Le plan « Education pour tous » prévu jusqu’en 2015 permet d’établir un contenu d’enseignement obligatoire pour tous mais il n’est pas encore mis en œuvre. Des écoles traditionnelles ont été ouvertes aux abords des villes, et des programmes pour les enseignants sont en place pour les inciter à aller enseigner dans les campagnes. Ils doivent enseigner 5 ans en zone rurale avant d’enseigner en ville. Des mesures sexospécifiques sont en place pour l’enseignement supérieur dans certains domaines (droit, journalisme, etc.). L’analphabétisme est en baisse, il a été réduit de moitié chez les femmes en 10 ans. Elle a admis que les zones rurales restent les premières touchées mais a affirmé que des centres pour lutter contre l’analphabétisme ont été ouverts, en partenariat entre l’Etat et les ONG.
En matière de formation permanente, elle a indiqué qu’un département du Ministère du travail ciblait les besoins des femmes en mettant l’accent sur les femmes des zones rurales ou défavorisées. Elle a ajouté que les statistiques permettaient de constater que les femmes commençaient à accéder à des domaines professionnels traditionnellement réservés aux hommes. S’agissant des opportunités d’emploi, une représentante de la délégation a assuré qu’il n’y avait pas de discrimination en matière de prestations sociales et que les travailleurs étrangers et libanais étaient traités de la même façon. Un service spécial, a-t-elle ajouté, se charge de suivre le travail des étrangers de leur arrivée à leur départ du Liban. Quant aux conditions de travail des femmes libanaises, les statistiques mettent en évidence une amélioration même si les rémunérations ne sont toujours pas en phase avec le niveau de formation des femmes. Elle a indiqué qu’il ne pouvait y avoir de différence de salaire entre hommes et femmes dans l’administration publique compte tenu d’une grille de salaire très stricte.
Concernant l’article 12, Mme SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil, a demandé si la baisse du taux de natalité était due à un emploi maintenant possible des contraceptifs croissant et si une femme victime de viol pouvait avoir recours à un avortement.
L’experte de la Malaisie, a demandé s’il y avait une disparité dans l’accès pour les femmes aux médicaments et ce que le Gouvernement comptait entreprendre pour que les femmes puissent accéder sans discrimination aux soins. Elle a souhaité savoir si des programmes étaient consacrés spécifiquement aux personnes âgés, aux taux de mortalité maternelle et aux séquelles des avortements illégaux.
Concernant l’article 14, Mme ANAMAH TAN, experte de Singapour, a demandé ce que le Gouvernement libanais comptait entreprendre pour améliorer la situation des femmes rurales. Elle s’est particulièrement inquiétée des problèmes en matière d’adduction d’eau et d’assainissement dans les zones rurales en souhaitant des statistiques précises en ce domaine.
L’experte de l’Allemagne, a demandé si le Gouvernement envisageait un effort holistique et intégré en direction des femmes rurales et s’il y avait un calendrier et des objectifs chiffrés en ce domaine.
Mme GLENDA P. SIMMS, experte de la Jamaïque, a souhaité des informations sur la stabilité démographique des zones rurales et la proportion des femmes parmi les travailleurs ruraux en demandant une attention particulière aux femmes rurales qui travaillent la terre.
Répondant aux questions relatives à la santé, une représentante de la délégation libanaise a reconnu l’absence de statistiques sur l’avortement. Elle a précisé que même les ONG ne s’étaient pas préoccupées de cette question. Pour ce qui est des soins de santé, une représentante a indiqué que tous les travailleurs ayant des postes permanents étaient couverts par le fonds de solidarité et la sécurité sociale indépendamment de leur sexe. Pour ce qui est de la femme rurale, une autre représentante a mis l’accent sur les différences entre les zones rurales limitrophe aux grandes villes et celles qui en sont éloignées. Même si les femmes ne représentent que 7% des propriétaires de terres agricoles, leur situation s’améliore d’autant plus qu’elles ont accès à des méthodes de planification familiale qui réduisent la taille des familles. Elle a précisé que les zones les plus pauvres étaient celles limitrophes des grandes villes.
En ce qui concerne les articles 14 et 15, Notant que la loi sur l’adultère et d’autres lois étaient contraires à la Convention, Mme DUBRAVKA ŠIMONOVIC, experte de la Croatie, a demandé des explications sur la persistance de législations discriminatoires ou contraires à la Convention. Si Mme ANAMAH TAN, experte de Singapour, a demandé si le Gouvernement du Liban prévoyait d’amender le Code pénal dans le but de pénaliser la violence au foyer, Mme HUGUETTE BOKPE GNACADJA, experte de Bénin, a souhaité connaître les intentions du Gouvernement par rapport à l’élimination des crimes d’honneur. Elle a aussi demandé si les législations confessionnelles avaient intégré les nouvelles mesures législatives en faveur des femmes. Elle a également souhaité savoir quelle législation confessionnelle s’imposait dans le cas d’un mariage entre deux personnes de confessions différentes. Comment détermine t-on le tribunal confessionnel qui s’impose en cas d’un différend entre deux époux de religions différentes, a-t-elle demandé.
Notant que chaque libanais était soumis aux lois et à un des 18 tribunaux confessionnels, l’experte de l’Algérie, Mme MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, a demandé s’il existait effectivement 18 façons de rendre la justice au Liban. Elle a suggéré la rédaction d’un code civil unique s’appliquant à tous les libanais, tout en laissant à la sphère privée la possibilité de faire des mariages religieux.
Répondant à cette dernière série de questions, la représentante de la délégation du Liban a assuré que son pays s’est engagé à respecter de façon graduelle l’égalité totale entre hommes et femmes. Pour ce qui est de la violence domestique, elle a indiqué que les femmes soutenues par la société civile dénonçaient tous les cas de violence. Tous les efforts sont déployés, a-t-elle assuré, afin de promulguer une loi garantissant l’élimination de la discrimination à l’égard de la femme. S’agissant des différences entre les 18 lois confessionnelles, elle a précisé que c’était la loi confessionnelle utilisée pour le mariage qui va servir de référence pour régler toutes les relations entre l’époux et l’épouse. Même si les époux sont de confession différente, ils ne peuvent choisir qu’une religion de mariage.
Concluant les débats, l’experte des Philippines et Présidente du Comité, ROSARIO G. MANALO a constaté les efforts déployés par le Gouvernement libanais pour aboutir à une égalité entre hommes et femmes. Mais elle a demandé au Gouvernement de ratifier le protocole facultatif à la Convention et a suggéré que le Liban lève toutes les réserves qu’il a émises sur les articles 9, 16 et 29.
La présidente du Comité s’est dite inquiète de l’absence de dispositions dans les lois sur l’égalité entre hommes et femmes et a suggéré d’inclure dans ses lois une définition précise de la discrimination. Elle s’est félicitée de la création de la Commission Nationale pour la femme libanaise mais a estimé que cette Commission devait avoir plus de ressources. Elle a suggéré la création d’une mission stratégique et d’un plan d’action pour la promotion des femmes dans la vie politique.
Elle a déploré que les violences soient acceptées comme faisant partie du mode de vie libanais et a suggéré que le Gouvernement prenne des mesures sérieuses grâce à des lois et une meilleure formation de tout le personnel du système judicaire et policier. Elle a également exhorté le Gouvernement à mettre en place des mesures sur l’adultère, les crimes d’honneur et les violences à l’égard des travailleuses migrantes et à l’égard des stéréotypes, ainsi que des mesures garantissant l’égalité dans tous les domaines, notamment des mesures temporaires spéciales pour l’équité dans la vie politique et publique.
Enfin, elle a estimé qu’il fallait au Liban un code personnel uni pour renforcer égalité entre femmes et hommes. «Les intentions existent mais ce qui compte ce sont les actes”, a-t-elle conclu.
Dans ses dernières remarques, le chef de la délégation libanaise, Mme LEILA AZOURI, a pris note de la demande adressée au gouvernement libanais de progresser dans les efforts entrepris afin de parvenir à une véritable égalité entre les hommes et les femmes du Liban. Elle s’est engagée à poursuivre le processus engagé, malgré toutes les contraintes et difficultés particulières au Liban, dans l’intérêt de la mise en œuvre des buts et objectifs de la Convention.
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L'hebdo Magazine
Association des Dames de la Charité
Aider les plus démunis
Secourir sans aucune discrimination les plus démunies, c'est la dure mission à laquelle se sont attelées de concert l'Association des Dames de la Charité (fondée en 1856) et les Filles de la Charité, depuis Achrafié.
Mardi matin, dix heures. Un brouhaha général s'élève dans la salle de réunion du centre social des Filles de la Charité, située à proximité de la place Sassine, à Achrafié. Une vingtaine de membres sont là pour discuter de l'avancement de leurs projets avec sœur Maggy Harfouche, l'une des Filles de la Charité, et Maya Chami, la présidente de l'association. Toutes ces femmes sont bénévoles, et tentent de porter secours aux familles démunies, aux veuves sans ressources. Quelles que soient leur nationalité et leur religion, toutes les personnes dans le besoin peuvent requérir l'aide des Dames et Filles de la Charité, malgré les maigres finances dont celles-ci disposent.
Dès le début de la réunion, en quelques minutes, les idées fusent, les réactions éclatent, le dynamisme est de rigueur ici. Toujours enthousiaste et volontaire, sœur Maggy lance devant l'assemblée sa nouvelle idée. Pourquoi ne pas aider une famille à acheter un four, qui permettrait de produire des manakish que l'on pourrait vendre dans le quartier? L'idée semble plaire, mais coûte cher. Chacune des dames présentes -toutes des bénévoles- donne son avis, pèse le pour et le contre. Aucune décision ne sera prise aujourd'hui, mais l'idée de sœur Maggy reste dans toutes les têtes, car cela permettrait de faire travailler plusieurs personnes dans le besoin. Quelques minutes plus tard, une autre dame, toute fière, exhibe des chapelets en perles, ainsi qu'un tuyau de narguilé recouvert de perles colorées. Ces objets ont été confectionnés par des détenus condamnés à vie, à la prison de Roumié. «Nous animons des ateliers, au cours desquels les détenus peuvent fabriquer des objets, que nous allons ensuite vendre, pour donner de l'argent à leurs familles», explique-t-elle. Aussitôt, chacune des femmes commence à sortir quelques billets pour acheter un chapelet.
De véritables projets
Plus que de l'assistanat, ce sont de véritables projets qu'essayent de mettre en place les Dames de la Charité, en relation étroite avec les Filles de la Charité. Quand une personne dans le besoin vient frapper à la porte du centre, l'association ne donnera pas d'argent. En revanche, elle proposera des solutions. «Nous accueillons tout le monde, soulignent en chœur sœur Maggy et Maya Chami, et nous pratiquons ici une entraide mutuelle, qui est stimulante pour tout le monde». «Je préfère aider les gens qui travaillent», commente la présidente de l'association depuis six ans, mais qui en est membre depuis 1973. «Connaître l'autre, l'écouter, découvrir ses aspirations, l'aider à se promouvoir en soutenant sa lutte contre sa propre pauvreté», c'est la devise de l'Association des Dames de la Charité, qui demeure la plus ancienne association caritative du Liban. Par exemple, tous les jours, quelques femmes s'affairent dans la grande cuisine du centre de Sassine. De grandes marmites sont sur le feu, et la table est couverte de légumes à éplucher. «Pendant le mois de Ramadan, explique sœur Maggy, nous préparons 650 repas chauds tous les jours pour les étrangers en situation irrégulière détenus au centre de rétention de Beyrouth». L'opération est financée par Caritas Migrants. Des femmes dans le besoin viennent cuisiner pour ce projet, et perçoivent en échange une somme d'argent qui les aidera à faire vivre leur famille. D'autres confectionneront des plats libanais ou des confitures maisons, qui seront ensuite revendues par l'association. Chez les Dames de la Charité, tout fonctionne avec ce système d'entraide, qui permet à chacun de trouver son compte en aidant son prochain.
Dans son bureau, sœur Maggy dispose aussi d'un fichier de personnes cherchant du travail, de l'aide ménagère à la cuisinière, en passant par le jardinier. Régulièrement, des Libanais appellent pour proposer un emploi. «Lorsque la main d'oeuvre étrangère fait défaut, ou quand le personnel de maison rentre au pays pour un mois, il n'est pas rare que l'on nous contacte pour trouver une personne qui assurera l'intérim».
D'ailleurs, dans les différentes antennes de l'association, les salariés qui ont été embauchés sont pour la plupart des personnes en difficulté sociale. A Karm el-Zeitoun, où se trouve le dispensaire, sœur Bernadette, 82 ans, gère la pharmacie avec peu de moyens, et tente d'organiser le centre médical Rose Kettaneh, du nom de l'ancienne présidente de l'association. Celui-ci accueille des personnes défavorisées qui nécessitent des soins, que cela concerne le médical ou les soins dentaires. Et si on lui demande comment elle parvient à acheter les médicaments pour la plupart destinés aux diabétiques, cardiaques, et autres maladies chroniques , elle répond que dès qu'elle reçoit un don, qu'il s'agisse de 20 ou de 100 dollars, elle file acheter des médicaments. «Nous avons un gros problème pour nous en procurer», explique sœur Maggy, «car ils sont très chers». Au premier étage du dispensaire se trouve la clinique dentaire, dotée d'un matériel tout relatif, mais qui permet au moins d'assurer des soins basiques. Environ une quinzaine des habitants démunis du quartier bénéficient de ces soins à prix modiques, grâce à la participation d'un dentiste qui casse ses prix. Un peu plus loin, dans une autre ruelle de Karm el-Zeitoun se trouve une autre annexe du centre social des Filles de la Charité. Marcelle, veuve, a été engagée pour s'occuper de ce centre. Elle s'occupe ici des travaux quotidiens, accueille les gens du quartier, fournit les renseignements nécessaires. Mais surtout, elle gère ce que les Filles appellent le «vestiaire». Là, de nombreux vêtements en bon état pour hommes, femmes et enfants sont entreposés, puis vendus à des prix symboliques variant de 1 à 4 dollars. «Nous faisons cela pour préserver la dignité des pauvres, et nous les vendons à des prix très bas, sauf un jour par mois, ou nous organisons une solderie... gratuite», avancent sœur Maggy et Maya Chami. Même chose pour le soutien scolaire, dispensé dans une salle du premier étage. «Pour que les parents soient sensibilisés et responsabilisés, nous leur demandons environ 10000 Livres libanaises par mois pour l'accueil de leurs enfants». Tous les jours, une vingtaine d'enfants âgés de 6 à 11 ans bénéficient ainsi d'une étude surveillée, après l'école, qui leur permettra de faire leurs devoirs, d'emprunter des livres, en toute sérénité. Une personne du quartier, instruite, a été embauchée pour les aider à revoir leurs leçons et à rattraper leur retard.
300 à 400 familles aidées
Aujourd'hui, sœur Maggy et Maya Chami voudraient bien avancer, et monter d'autres projets. Mais rien n'est facile quand les financements se sont de plus en plus rares. «On aide environ 300 à 400 familles avec un budget mensuel de 5 millions de livres libanaises», déclarent-elles. Bref, ce n'est pas évident, d'autant que la classe moyenne disparaît et que la pauvreté grandit dans le pays. Sont-elles optimistes pour l'avenir? «On ne peut pas l'être par les temps qui courent, mais on ne désespère pas». Parmi les projets qu'elles aimeraient mettre en place, celui de l'alphabétisation des mamans de Karm el-Zeitoun, pour qu'elles puissent à leur tour faire travailler leurs enfants.
Pour «un monde meilleur»
Chaque été, près de soixante-dix enfants sont accueillis à la montagne, dans une colonie, pour leur apprendre à «tisser des liens pour un monde meilleur», selon le thème fixé cette année. Pendant 21 jours, des enfants issus de différents niveaux socio-économiques et de plusieurs nationalités (Palestiniens, Irakiens, Libanais, Autrichiens, Syriens, Français et Malaisiens etc.) se retrouvent à Kfarzebian. Des activités et sorties leur sont proposées, permettant aux enfants de se connaître et d'apprendre à vivre ensemble.
TEMOIGNAGE DE SYLVIE
Née au Liban, adoptée en France.
Je m'appelle Sylvie Poupelin Valin, je suis née le 1er août 1968, au LIBAN à Beyrouth et le lendemain de ma naissance les soeurs sont venues me chercher pour m'emmener à la crèche, et 2 mois après, je suis partie pour la FRANCE en VENDEE où j'ai été adoptée par une famille généreuse et superbe à qui je dois tout
J'ai passé une adolescence rebelle, j'étais bien dans ma tête, enfin je le croyais. Jamais je ne voulais entendre parler du LIBAN, quand la télévision était allumée, je quittais la table, tout ça pour dire que finalement ça mûrissait à son rythme.
En 1992, mon 1er fils est né, ça allait, je commençais à me poser des questions, mais sans plus, ma vie continuait... Trois ans après en 1995, mon second fils arrive, j'était comblée, 2 enfants un mari, une vie tout à fait normale. Cela a bien demandé 2 à 3 ans mais plus tard, là j'ai pété les plombs, comme on dit, le passé s'est réveillé en moi, des questions sans réponses et sans réponses on ne peut pas avancer. Mes enfants finalement à qui ressemblaient-ils ?
Un jour, par hasard, on m'a communiqué le numéro de téléphone de l'association des enfants adoptés du Liban et je me suis mise en contact avec eux. C'est un grand soulagement de savoir qu’on n’est pas seul à être différent des autres.
Aujourd’hui, je suis à la recherche de mes origines et de mon passé, pour pouvoir avancer dans ma vie, j’ai besoin de savoir qui je suis, car je n'ai pas d'identité.
Professionnellement c'est une vraie catastrophe, je ne n'arrive pas à me stabiliser. Tout est flou dans ma tête. Pourtant il faut avancer parce ce qu'on n'a pas le choix. Pour mes enfants et mon mari, il le faut, mais c'est quand même très dur.
Il n'y a pas une journée où mon passé n'est pas présent. Mais par où commencer ?
Moi-même dans ma tête, j’ai beaucoup mûri dernièrement, mais l'on n’efface pas un passé que l’on n’a jamais connu et sans le connaître, je ne peux pas avancer.
Cela fait 1 ans à peu près, que je fais une thérapie, ça m'aide à m'accepter comme je suis, mais ça ne répond pas à mes questions, toujours ses questions qui me prennent la tête et auxquelles peut-être, je n'aurai jamais de réponses, j’en suis tout à fait consciente, malgré tout j'ai toujours un espoir.
Je ne suis jamais retournée dans mon pays, car je suppose que le moment n'était pas venu, mais maintenant que je suis prête à y aller, financièrement je ne peux pas, car actuellement je suis au chômage, mais ce n'est que partie remise. Voir la terre ou je suis née, connaître mon pays qui me hante tant, et qui me manque aussi.
Aujourd’hui je suis en attente de mon dossier, pour pouvoir me stabiliser, me construire, être mieux dans ma tête et pouvoir vivre ma vie pleinement. Car ses doutes, ces manques, c’est très dur à vivre et un jour peut-être pouvoir raconter une belle histoire à mes enfants qui me posent énormément de questions dont je n'ai pas la réponse. Donc finalement, toute ma famille est affectée par mon histoire.
Voilà quelques lignes de mon histoire. Merci à tous.
Sylvie
L'orient le jour
Un véritable parcours du combattant qui se solde souvent par un échec Les enfants adoptés à la recherche de leurs origines libanaises |
Emil Gustafsson est né le 7 août 1978 et a été adopté en janvier 1979 par un couple mi-danois, mi-suédois. Dans le cadre de sa quête de ses parents, il a participé à une émission |
Pascale Picard Porhel est née à Beyrouth le 15 août 1968 sous le nom fictif de Myriam Haffar. Ce n’est qu’en 1969 qu’elle est abandonnée à la crèche Saint-Vincent-de-Paul, et en mai 1970 qu’elle est adoptée par des Français. |
Ils s’appellent Daniel Drennan, Laurencia Gouasdoué, Nathalie Broden-Barbareau, Madeleine Christinaz, Pascale Porhel, Arjen Kamsteeg, Marie-Hélène Le Moal, Emil Gustaffsson, Fabienne Buhl, Sylvie Popelin ou François Denoyers. Leurs noms ne vous diront rien. Ils sont français, britanniques, suédois, suisses, hollandais, canadiens ou américains. Mais les porteurs de ces noms ont tous une chose en commun : ils sont nés au Liban, il y a vingt, trente ou quarante ans, de parents libanais, du moins le pensent-ils. C’est à partir d’un e-mail, envoyé à L’Orient-Le Jour par Daniel Drennan, que nous avons pu nous mettre en contact avec eux, par téléphone ou par messagerie électronique. I - Témoignages - « Il est difficile de savoir où l’on va quand on ne sait pas d’où l’on vient » La démarche de ces « adoptés » vient d’un désir profond de retrouver « leurs racines » libanaises, ou des connexions leur permettant de récolter ne serait-ce que des bribes d’informations concernant leurs origines, leurs familles et plus particulièrement leurs mères biologiques. Ce désir, ils le ressentent en eux depuis toujours, malgré l’amour qu’ils ont reçu de leurs parents adoptifs. Leur équilibre personnel en dépend d’ailleurs. Taraudés par l’obsession de retrouver leurs mères, mais aussi de comprendre les motivations qui ont poussé celles-ci à les abandonner, ils ont fait le voyage au Liban plusieurs fois, ont frappé à toutes les portes, celles des crèches, des hôpitaux, des maternités, des pédiatres, des avocats, avant de se rendre à la triste évidence que leur recherche n’avait que de minces chances d’aboutir, par manque de structures. D’autres n’ont ressenti le besoin d’entreprendre cette démarche qu’après avoir eu des enfants, au fil des années. Certains ne sont jamais allés plus loin que la recherche d’une simple information, par Internet. Chez les uns et les autres, le souci de ménager leurs parents adoptifs domine, des parents qu’ils aiment très fort et qu’ils ne voudraient blesser en aucun cas, malgré l’incompréhension qui s’installe parfois. L’équilibre retrouvé en dépit de ce manque qui vous habite Alexandrine, née en 1965, adoptée par des parents français en 1969, a longtemps cherché sa famille biologique au Liban. Désormais, elle ne cherche plus, du moins pas activement, freinée par le manque de structures lui permettant de retrouver sa famille. « Il est important d’initier la quête, mais il faut s’en sortir, à un moment donné », dit-elle. C’est en paix avec elle-même qu’elle vit aujourd’hui, installée au Liban depuis 16 mois. Mais elle évoque sa souffrance, son isolement, ce mal-être inconscient qui la poussait à avoir besoin de communiquer avec tous ceux qui sont dans son cas. « Cela rapproche et soulage », constate-t-elle. Elle parle aussi de cette révolte contre les religieuses qui l’a longtemps habitée : « Je les rendais responsables de mon éloignement de mon pays natal », dit-elle. Un éloignement qu’elle n’a jamais accepté, même si elle reconnaît avoir été adoptée par des parents « super ». Des parents auxquels elle reproche néanmoins d’avoir changé son prénom, son identité, tirant ainsi un trait sur son passé, sur ces quatre années passées à la crèche. « Ils n’ont pas compris que je voulais savoir », dit-elle. « Ils m’ont appelée Alexandrine alors que je m’appelais Nelly Siham. » D’ailleurs, ce prénom, la jeune femme le revendique encore. Car il pourrait être le lien entre elle et sa famille naturelle. Refusant d’être l’enfant idéal dont rêvait ses parents, Alexandrine s’est longtemps rebellée : « Je n’avais pas les yeux bleux comme eux, je n’étais pas BCBG comme ils voulaient que je le sois. Je donnais des surnoms à ma mère, plutôt que de l’appeler maman. Elle en a souffert. Était-ce volontaire de ma part ? » L’Adeal, une association d’entraide L’Association des enfants adoptés du Liban (Adeal) a été créée en 2002, à l’initiative de cinq personnes, dont Laurencia Gouasdoué qui en est l’actuelle présidente. L’objectif de l’association est de favoriser les contacts et les rencontres entre les adoptés du Liban, qu’ils viennent de la crèche Saint-Vincent-de-Paul, des sœurs du Bon Pasteur ou d’ailleurs. L’Adeal tente aussi de soutenir dans leurs démarches les personnes en quête de leurs origines.
Marie-Hélène le Moal a retrouvé sa mère biologique grâce à son frère autiste. Retrouver sa mère biologique : bonheur et déception Marie-Hélène le Moal fait partie des rares personnes dont les recherches pour retrouver ses parents biologiques ont abouti. De passage au Liban l’année dernière, après 29 ans passés en France, elle a retrouvé sa mère au bout de deux jours, « une femme éduquée, trilingue, qui semble assez aisée », selon la jeune femme. « Une femme à laquelle je ressemble, dit-elle avec fierté. C’est grâce à mon frère autiste, abandonné comme moi, que les religieuses de la crèche se sont souvenues de ma mère », précise-t-elle. Et d’ajouter : « Cela fait plaisir de connaître enfin ses racines, même si la vérité est parfois dure. » Dossier réalisé par Anne-Marie EL-HAGE |
MAGAZINE NOUN
Une discrimination certaine, dans les lois et les pratiques, existe toujours à l'égard de la femme libanaise, qui peine à acquérir certains de ses droits fondamentaux. Pourtant, la Constitution libanaise affirme l'égalité de tous les Libanais, quant aux droits civils et politiques notamment. Par ailleurs, Le Liban a signé de nombreux traités visant à l'amélioration de la situation de la femme, notamment la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, considérée comme la Déclaration universelle des droits de la femme. Noun dresse un état des lieux.
En 1996, le Liban signe la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW, en anglais). Hélas, au lieu de profiter de cette signature pour moderniser sa législation et la rendre conforme à la Constitution en établissant l'égalité entre les citoyens sans distinction de genre (pris ici au sens social), le Liban a préféré stagner dans la situation discriminatoire actuelle. Concrètement, le Liban a exploité la possibilité qu'offre la CEDAW d'apporter à la Convention des limitations concernant son champ d'application. Notre Etat y est donc allé de son lot de réserves, ce qui prouve assez l'absence de la volonté politique indispensable pour reconnaître à la femme libanaise une citoyenneté à part entière. Si cette convention affirme l'obligation des Etats de garantir l'égalité des hommes et des femmes dans tous les domaines: économique, civil, culturel, politique, le Liban en a exclu les deux principales dispositions qui nous intéressent ici: la possibilité pour la femme de transmettre la nationalité à ses enfants et celle d'avoir "les mêmes droits et les mêmes responsabilités au cours du mariage et lors de sa dissolution, les mêmes droits et les mêmes responsabilités en tant que parents (...), les mêmes droits et responsabilités en matière de tutelle, de curatelle, de garde et d'adoption des enfants (...), les mêmes droits personnels au mari et à la femme (...) en ce qui concerne le choix du nom de famille (...)" Sous l'impulsion d'organisations internationales et d'organisations non gouvernementales actives dans la lutte contre toute forme de discrimination envers la femme, de très légers progrès ont certes été réalisés, notamment au niveau des allocations sociales, du congé maternité et du crime d'honneur. Mais la situation est loin de s'améliorer dans les domaines principaux, celui de la nationalité, du statut personnel - qui réglemente les fiançailles, le mariage, la filiation, la tutelle, la garde des enfants et la pension alimentaire - et de la participation économique et politique.
Discriminations flagrantes et préjugés primitifs
"La plus grave atteinte aux droits de la femme est sa citoyenneté manquante", affirme Lina Abou Habib, présidente du Centre de recherche et d'entraînement sur le développement (CRTD, en anglais). Pour le législateur, le citoyen est mâle, la femme étant celle qui suit. Cette conception d'une citoyenneté de deuxième rang se traduit notamment au niveau de la nationalité et du statut personnel. Celui-ci est laissé au libre arbitre des communautés confessionnelles, qui viennent donc s'interposer entre l'Etat et le citoyen. "L'Etat affirme ainsi n'avoir de relations qu'avec les hommes, poursuit Lina Abou Habib, puisqu'il n'existe pas d'élément féminin dans la hiérarchie religieuse." Le problème de l'Etat démissionnaire mis à part, les pratiques discriminatoires sont encouragées au sein des institutions, à commencer par la famille, et le contenu du statut personnel n'est pas seul en cause. En plus de la soumission des relations mari-épouse à un code rigide, la discrimination entre filles et fils en faveur de ces derniers, y compris par la mère, perpétue les inégalités, puisque les filles devenues mères vont reproduire le système. Cette éducation constitue un frein certain à l'évolution des mentalités et à l'acquisition du réflexe de l'égalité des genres. Le marché du travail est également discriminatoire: pratique du harcèlement sexuel, promotion plus lente pour les femmes, jugées moins productives par rapport aux hommes. Ce préjugé n'est pas le moindre. D'après des études menées sur le terrain par le CRTD, les hommes, toutes classes sociales et économiques confondues, considèrent les femmes comme émotives, incapables de prendre une décision, irrationnelles, mesquines, ne s'aimant pas les unes les autres, moins intelligentes (que les hommes, évidemment!), ou alors "aussi intelligentes que les hommes sauf quand elles sont enceintes", dixit - excusez du peu - un universitaire! Autant de qualificatifs qu'on pourrait employer à l'égard de certains de nos hommes politiques, y compris les plus en vue, mais qui ne les empêchent pourtant pas d'accéder aux fonctions qui sont les leurs.
Les atteintes aux droits de la femme
La nationalité La femme mariée à un étranger ne peut lui transmettre sa nationalité libanaise, pas plus qu'aux enfants nés de cette union. Cette situation crée des complications importantes, d'autant plus que, d'après les résultats d'une étude régionale menée par le CRTD et publiée en février 2004, les femmes ignorent souvent ce déni de leur droit, ou, si elles en ont connaissance, en ignorent les conséquences sur le plan pratique: nécessité d'un permis de séjour avec toute la paperasserie et les tracasseries administratives; impossibilité d'accès au système de santé public et gratuit; restrictions quant au marché de l'emploi; problèmes de succession; inadaptation des enfants, qui ne sont pas considérés comme Libanais... Les problèmes les plus graves se rencontrent parmi les femmes ayant épousé un ressortissant arabe (elles ne peuvent pas enregistrer l'enfant si le mari est absent ou en voyage). Pour justifier que la femme libanaise ne puisse pas transmettre la nationalité à ses enfants, des arguments politiques et confessionnels - le refus de naturaliser les Palestiniens et de perturber l'équilibre démographique entre les communautés religieuses - sont avancés. Or, ces raisonnements ne tiennent pas la route. Comme le souligne Me Ziad Baroud, secrétaire général de l'Association libanaise pour la démocratie des élections, "le Conseil constitutionnel a admis que les Palestiniens soient exclus de la loi sur l'appropriation par des étrangers de biens immobiliers au Liban. Pourquoi ne pas appliquer, en attendant une solution juste pour tout le monde, la même exclusion au niveau de la nationalité, concernant les Libanaises épousant des Palestiniens?" Des arguments plus terre à terre sont aussi avancés: est-ce que tous les hommes palestiniens vont épouser des Libanaises? L'impossibilité pour la femme libanaise de transmettre sa nationalité a-t-elle empêché la guerre de 75-90 d'éclater? Dans un Etat moderne, rien ne peut en réalité justifier l'interdiction faite à une femme de donner sa nationalité à ses enfants.
Statut personnel
Le problème du statut personnel au Liban est que ses dispositions sont laissées à la discrétion des 18 communautés religieuses reconnues: 18 communautés et presque autant de statuts personnels. Comme le déclarait la regrettée Laure Moghaïzel en 1991, "les lois du statut personnel sont variablement injustes à l'égard des femmes. Non seulement elles établissent une discrimination entre l'homme et la femme, mais entre les femmes elles-mêmes, érigeant des barrières entre les citoyens, ce qui est en contradiction avec les principes de la démocratie et la Charte des droits de l'homme", et de la CEDAW, pourrions-nous ajouter aujourd'hui. Sans vouloir entrer dans les méandres de la réglementation propre à chaque communauté, voici tout au moins les dispositions dont l'injustice ou l'anachronisme paraissent les plus flagrants:
1- La tutelle appartient au père dans toutes les communautés (à l'exception de la communauté israélite). De cette reconnaissance exclusive, découlent l'impossibilité pour une mère d'ouvrir un compte bancaire à ses enfants, même si c'est elle seule qui y contribue financièrement; la nécessité d'obtenir l'autorisation du père préalablement au voyage des enfants, y compris avec la mère; l'autorisation du père préalable à la demande d'un passeport... De plus, en cas de décès du père, la mère ne devient pas automatiquement la tutrice de ses enfants! Chez les musulmans, le grand-père paternel des enfants en devient le tuteur légal ou, à défaut, les hommes du côté de la mère (la tutelle sur les biens étant cependant exclue dans ce cas). Chez les chrétiens, il faut distinguer entre orthodoxes et catholiques. Chez les premiers, le grand-père paternel devient tuteur légal en cas de décès du père ou, à défaut, la personne désignée par le tribunal. Chez les seconds, le tuteur est celui que le père a désigné avant son décès ou, à défaut, celui que le tribunal désigne, la mère venant en premier, à moins qu'elle se remarie, puis le grand-père paternel.
2- La garde des enfants: sauf exception, toutes les communautés donnent la priorité à la mère jusqu'à l'âge de 7 ans pour les garçons, 9 ans pour les filles; chez les chiites, la période passe à 2 ans pour les garçons et 7 ans pour les filles, ce qui ne devrait pas étonner étant donné que l'âge du mariage légal de celles-ci est fixé à 9 ans à condition qu'elles aient eu leurs règles, contre 15 ans pour les garçons; chez les catholiques, le tribunal fixe le droit de garde en fonction du meilleur intérêt de l'enfant.
3- Le divorce: chez les orthodoxes, le mari peut demander le divorce, notamment s'il se révèle que la femme n'était pas vierge le jour du mariage, à moins que le mari n'en ait eu connaissance au préalable; si la femme avorte sans la connaissance et le consentement de son mari; si le mari interdit à son épouse de fréquenter un lieu donné ou des personnes de réputation douteuse et qu'elle ne se plie pas à cette interdiction. Chez les sunnites, le droit de demander le divorce est reconnu à la femme, à condition qu'elle demande la osmat lors du contrat de mariage et que le mari accepte. Elle peut également demander la séparation dans certains cas précis. 4- La succession: les communautés non musulmanes sont soumises depuis 1959 à une loi civile qui reconnaît l'égalité entre les successeurs, quel que soit leur genre. Il n'en va pas de même chez les musulmans, chez qui l'homme hérite du double de la part de la femme. Par ailleurs, le mariage entre un chrétien et une musulmane prive celle-ci de son droit d'hériter. C'est aussi le cas du musulman qui épouse une chrétienne. Il faut souligner que le pouvoir juridictionnel détenu par les tribunaux religieux donne lieu à certains abus au détriment de la femme, en matière de pension alimentaire en cas de divorce ou même pour l'obtention du divorce ou de la garde des enfants, y compris dans les cas où la faute du mari est établie.
Adultère
Que dire d'une loi si franchement inique envers les femmes, qu'aucun prétexte, même bancal, ne peut justifier? Que justement, elle est franche et ne s'encombre pas de détours? 3 mois à 2 ans d'emprisonnement pour la femme adultérine, 1 mois à 1 an d'emprisonnement pour le mari adultérin, à la condition - dans le cas de l'homme, est-il besoin de préciser - que l'adultère ait été "consommé" au domicile conjugal, ou que la liaison soit notoire. Pour se consoler, on pourra toujours se prévaloir de ce que l'amant d'une femme adultérine, s'il est marié, encourt la même peine que celle-ci. Le législateur aurait pu se montrer encore plus discriminatoire en établissant des peines différentes pour la femme et l'amant! Toujours au chapitre de l'indulgence du législateur vis-à-vis des hommes, Me Ziad Baroud relève qu'aucune loi ne pénalise le client d'une prostituée qui, elle, encourt en revanche une peine de prison pouvant aller jusqu'à un an. Droit fiscal Si le père et la mère travaillent, l'homme seul bénéficie d'un abattement sur les enfants. La femme n'en bénéficie que si le mari décède ou s'il devient handicapé et cesse par conséquent toute activité. De même, si la femme ne travaille pas, le mari bénéficie d'un abattement. L'inverse n'est pas vrai: si la femme travaille et que le mari est inactif, la femme ne tire profit d'aucun abattement sur ses revenus pour le calcul du montant de l'impôt.
La participation politique
Avec 2,3% de femmes siégeant au Parlement, le Liban occupe la 105e place au classement mondial! Là encore, le système patriarcal fait des ravages au niveau de l'égalité des genres. Comme le souligne Lina Abou Habib, "comment une société fondée sur un tel système peut accepter d'être représentée ou gérée par une femme?" Une candidate se présentant aux élections municipales s'est ainsi entendu demander s'il "n'y avait pas d'hommes dans sa famille pour la représenter?" Ces constatations ont amené plus d'une personne à se demander s'il ne serait pas judicieux d'introduire le système des quotas dans la loi électorale. Même ceux qui ont des oppositions de principe - sans compter les difficultés de mise en place - y voient une étape transitoire indispensable pour ancrer la participation féminine à la vie publique et à la prise de décision. Une proposition en ce sens avait été faite au Parlement, la veille des élections municipales en avril 2004, sans résultat: absence de volonté ou conscientisation insuffisante sur la nécessité de la présence de femmes dans la vie politique? A lire absolument, le rapport de Transparency International, intitulé "Corruption Perceptions Index 2003", qui établit un lien entre la présence de femmes au pouvoir et un taux de corruption très bas. Encore faut-il que celles qui parviennent au pouvoir aident leurs consœurs et qu'elles aient le courage de remettre en cause le système patriarcal, même si c'est grâce à lui qu'elles sont parvenues à leur poste.
Les progrès réalisés
Si le droit libanais du travail reconnaît, depuis 1946 notamment, une égalité de principe entre employées et employés, il a fallu attendre tout de même l'an 2000 pour que la loi interdise expressément à l'employeur toute discrimination en raison du genre concernant la nature du travail, la rémunération, l'emploi, la promotion, l'augmentation de salaire, la formation continue et l'habillement! Dans la foulée, le législateur a augmenté la durée du congé maternité, qui est passé de 40 jours à 7 semaines (9 jours de gagnés) et a interdit le licenciement d'une femme enceinte, possibilité qui était ouverte à l'employeur, jusqu'à l'an 2000 donc, durant les 5 premiers mois de la grossesse. L'acquis principal reste cependant la perception désormais égalitaire des droits de l'affilié à la Caisse nationale de Sécurité sociale, quel que soit son genre. Jusqu'en décembre 2002, seul l'affilié de sexe masculin bénéficiait de toutes les prestations de la sécurité sociale, car considéré comme celui qui subvient aux besoins de la famille. L'employée ne pouvait profiter des indemnités familiales qu'en cas de divorce et si un jugement lui conférait la garde des enfants, qu'en cas de veuvage, ou si le mari était incapable de travailler. De plus, la CNSS pouvait demander le remboursement par l'affiliée des prestations financières reçues au nom de ses enfants. Ces multiples discriminations ont eu un impact sur "la participation incroyablement faible des femmes dans le secteur économique dit formel", comme l'affirme Lina Abou Habib. La présence des femmes est par contre importante dans le secteur informel (agriculture, artisanat, travaux non rémunérés tels le travail à la maison, la petite confection...), où elles ne bénéficient pas de la protection de la loi, donc d'aucun droit, et où le travail, en plus d'être aléatoire, est mal rémunéré. Sur le terrain, le rapport du PNUD sur les objectifs de développement du Millenium (septembre 2003) confirme la faiblesse de la participation de la femme au cycle économique et décrit une réalité peu satisfaisante: bien qu'il n'existe pas une grande différence dans l'accès à l'enseignement, les femmes comptent pour 21,7% seulement de la population active et ne contribuent qu'à hauteur de 14,7% dans l'activité économique; la différence du salaire moyen est assez discriminatoire (de l'ordre de 20% en 1997); pas plus de 8,5% , en 1996, de femmes occupent des postes de direction. La même situation prévaut dans le secteur public: 2% des femmes occupent des postes de catégorie 1, contre 10% et 19% pour les catégories 2 et 3. Quant au crime d'honneur, plutôt que de supprimer purement et simplement en 1999 toute excuse de quelque genre qu'elle soit, le législateur a préféré substituer à l'excuse absolutoire l'excuse atténuante. Il est bien entendu que seuls les hommes bénéficient de l'indulgence de la loi vis-à-vis de ce crime. Les progrès réalisés paraissent donc bien minces au regard de la tâche qui reste à accomplir. Il ne s'agit pas uniquement de moderniser les lois, mais tout autant de changer les mentalités, d'ancrer une conviction que la femme n'est pas qu'un corps qui infante, qui travaille, voire qu'on exploite, mais une conscience et une vision neuve qui peuvent servir à apaiser la société et à renouveler, pour le meilleur, la conception qu'on peut s'en faire. La loi sur le statut personnel doit pouvoir échapper aux communautés, les jeunes sont d'ailleurs à 47,7% en faveur d'une loi sur le mariage civil comme le montre le résultat d'une étude menée par le sociologue Dr Hassan Hamdane, publiée en 2003 (source: Cawtaryat, n°11, avril 2003). Profiter de ce nouvel élan de la jeune génération, lever les réserves à la CEDAW, donner à la femme l'envie et les outils - par l'introduction à titre transitoire du système des quotas - qui lui permettront de s'impliquer dans la vie publique de son pays, tant au niveau local que national, reconnaître ses capacités au plus haut niveau, voici en partie ce qui nous manque pour que la femme puisse, avec son partenaire masculin, bâtir une société plus juste, plus tolérante et moins corrompue. top
Nisrine Salhab
L'orient le jour
Société - Les statistiques libanaises ignorent les couples « illégaux » Le concubinage, une expérience qui tente de plus en plus les jeunes |
Noun
Debout dans son parc, Mathieu, petit bout de chou d'un an et deux mois, est le centre d'attraction de tout son petit monde: ses parents, grands-parents, oncles et tante, proches et amis de la famille. Tous le cajolent, le dorlotent, le font jouer, captivés par ses grands yeux noirs écarquillés et malicieux, qui semblent toujours réclamer de l'attention.
"Toutes les personnes qui croisent le chemin de Mathieu tombent sous son charme. Cet enfant inspire des élans inexplicables. Il dégage quelque chose de magique", s'extasie Nelly, sa maman.
Un jour, lorsqu'il sera en âge de comprendre, Mathieu apprendra qu'il n'a pas grandi dans le ventre de cette mère qui le couve aujourd'hui de son amour. Mais cela a-t-il vraiment une importance puisque, pour sa maman, le fait qu'il soit un enfant adoptif n'est qu'un détail, qui ne change absolument rien à son vécu de mère. Elle n'a de cesse de répéter que, pour son mari et elle, comme pour toute sa famille, "enfant adoptif ou pas, Mathieu est notre enfant". Et de rappeler que Mathieu a été désiré et attendu, tout comme son frère aîné, Nicolas, fils biologique de Nelly et son mari. Un temps de gestation psychologique et affective, pendant lequel s'est intensifié le désir de ce second enfant. Le couple avait envie de donner un petit frère ou une petite sœur à Nicolas, mais pour des raisons médicales, Nelly n'était pas en mesure d'assumer une seconde grossesse. Passé le temps de réflexion, et après avoir consulté famille et entourage proche, le couple décide de s'engager dans une procédure d'adoption.
Un miracle à la veille de Noël
Vivant en France, son mari et elle se tournent tout naturellement vers le Liban, avec lequel ils entretiennent des relations très étroites, la famille de Nelly y résidant. "Mais nous voulions également voir ailleurs, au cas où notre demande n'aboutirait pas au Liban. Nous étions donc prêts à adopter un enfant de n'importe quelle race ou origine", précise Nelly. Pour pouvoir adopter, le couple fait donc en France une demande d'agrément, qu'il obtient environ un an plus tard, en décembre 2002, quelques jours avant de venir passer les fêtes de Noël au Liban. Durant les semaines suivantes, tout s'enchaîne très vite: "De façon un peu magique, se souvient Nelly. Tout convergeait pour que nous ayons cet enfant. C'était vraiment très étonnant parce qu'il y a eu une myriade de coïncidences qui ont fait que c'était lui et pas un autre." L'attente de ce bébé s'est pour eux rapidement et presque miraculeusement dénouée. Car, lorsqu'un couple s'engage dans un processus d'adoption, il peut attendre des années avant de voir sa demande aboutir. Pour Nelly, l'heureux événement commence à poindre du nez à la suite d'un coup de fil de son frère, quelques jours avant l'arrivée du couple au Liban: "Mon frère m'a appelée pour m'annoncer qu'il y avait un bébé abandonné qui venait d'être opéré du cœur et qui était à l'hôpital." Par la suite, le couple apprend que l'enfant avait été confié, quelques jours après sa naissance, au Couvent du Bon Pasteur, par une jeune femme, sans que l'on sache si elle était la mère. Les sœurs, s'étant rendu compte qu'il était malade, avaient emmené l'enfant à l'hôpital, et grâce à leur dévouement, à la générosité des médecins et de CAP-HO, une association qui vient en aide aux enfants malades et tente de rassembler des fonds pour leur payer les frais d'hospitalisation, Mathieu avait pu subir une importante opération cardiaque. "Cet enfant a vraiment fait bouger beaucoup de gens, c'est vraiment une histoire d'amour. A chaque fois que quelqu'un se trouvait sur son chemin, c'était un élan de générosité et d'amour assez étonnant", note Nelly. Dès leur arrivée au Liban, son mari et elle se rendent à l'hôpital, mais ils se voient refuser le droit de voir l'enfant: "On nous a dit que nous n'étions absolument pas prioritaires pour l'adoption, que d'autres familles avaient déposé des dossiers depuis des années. Nous devions faire la queue comme tout le monde." Mais, le 30 décembre, un coup de fil inattendu les invite à se rendre à l'hôpital: "Une dame de l'association CAP-HO nous a expliqué la situation de Mathieu, et nous a demandé si nous souhaitions le voir. Dès que je l'ai vu, si mignon, tout petit, et dès qu'on l'a mis dans mes bras, j'ai commencé à pleurer. Même maintenant, lorsque j'y repense, cela me fait pleurer. C'était vraiment très émouvant, et pour nous, c'était trop beau pour être vrai." Tout s'est alors passé très vite. Le 31 décembre au soir, le couple apprend que la demande d'adoption est acceptée: "La mère supérieure du couvent nous a donné la liste des documents à fournir, et nous a demandé le prénom que nous voulions choisir. Nous avions déjà décidé de prénommer notre enfant Mathieu. Nous avons acheté du gâteau, du champagne, et nous sommes allés à l'hôpital pour annoncer à Mathieu que nous étions désormais ses parents. Puis, nous sommes revenus annoncer l'heureuse nouvelle à toute la famille, comme si nous venions vraiment d'avoir un nouveau-né. Nous avons tous fêté l'événement en buvant à la santé de Mathieu."
La santé du petit garçon portait en effet à inquiétude, mais cela n'a à aucun moment dissuadé le couple d'adopter cet enfant bleu, c'est-à-dire atteint d'une pathologie cardiaque. "La supérieure du couvent nous a posé la question: êtes-vous sûrs que vous voulez de cet enfant malgré sa pathologie? Nous en étions sûrs. Des amis ont essayé de nous amener à renoncer. Ces avis nous ont aidés à tester nos motivations, et nous nous sommes rendu compte qu'elles étaient plus fortes que tout. Nous avons pensé que, malade ou pas, un enfant est un enfant, et si nous avions eu un enfant biologique malade, nous ne l'aurions jamais abandonné. Alors, si le destin mettait sur notre chemin un enfant atteint d'une pathologie, ce n'était pas une raison pour ne pas l'adopter. Nous avons fait la démarche en toute conscience, nous étions très convaincus, et nous ne le regrettons absolument pas. Nous sommes comblés, et nous avons deux enfants magnifiques", se réjouit Nelly.
Aujourd'hui, Mathieu est régulièrement suivi par des cardiologues pédiatriques dans un grand hôpital parisien. Dans la pathologie dont il souffre, il y a un risque de complications, mais heureusement, beaucoup d'entre elles n'ont pas eu lieu, et son état de santé est rassurant. Chaque année, on devra toutefois lui faire une échographie cardiaque, et à l'âge de 5 ans, il subira des examens plus poussés.
La croissance par Internet
Nelly se souvient des quelques semaines qui ont suivi l'adoption. Le plus dur était qu'ils allaient devoir repartir sans l'enfant, qu'ils n'avaient vu que quatre jours, jusqu'à leur départ pour la France, le 2 janvier: "C'était difficile mais nécessaire, car il fallait faire avancer les papiers le plus rapidement possible pour pouvoir revenir récupérer Mathieu." Pendant ce temps, le bébé est retourné au Couvent, où allait régulièrement le visiter la famille de Nelly. "Ma sœur m'envoyait des photos par Internet, donc je pouvais suivre régulièrement la croissance de Mathieu", confie-t-elle. Après un mois de course aux papiers en France, et un autre mois de démarches administratives au Liban, le 11 mars, le couple repart de nouveau pour la France avec, cette fois, son bébé dans les bras. Une vraie vie de famille commence pour Mathieu, qui fait connaissance avec Nicolas, son frère aîné. Nelly raconte, amusée, les rapports entre les deux frères: "Cela faisait longtemps que nous disions à Nicolas qu'il allait avoir un petit frère ou une petite sœur, mais cela s'est un peu précipité, puisque nous n'avions pas eu neuf mois pour l'y préparer. Il a d'abord vu Mathieu à l'hôpital, à travers une vitre. Il a alors raconté à tout le monde qu'il allait avoir un petit frère."
Inévitablement, l'arrivée de Mathieu a suscité des interrogations chez son frère aîné. "Alors, avant vous, c'était qui mes parents? nous a demandé Nicolas. Nous lui avons expliqué que, lui, il n'avait que deux parents, son père et moi. Je lui ai montré des photos de moi enceinte, et je crois qu'il a compris. Il m'a dit: Mathieu, lui, n'était pas dans ton ventre, mais maintenant il est de la famille, et c'est mon petit frère. Et lorsque Mathieu avait quatre mois, Nicolas lui disait: Quand tu grandiras, quand tu sauras parler, tu nous raconteras comment s'appelaient tes autres parents. Ou encore, il lui confie sa propre histoire: Moi, je voulais un petit frère, mais mes parents ne pouvaient pas faire un autre bébé, donc ils sont allés te chercher." Nelly souligne: "Bien entendu, il y a toujours un peu de jalousie de part et d'autre, comme dans toutes les fratries. Et comme tous les cadets, Mathieu recherche toujours la compagnie de son frère aîné. Il rayonne à chaque fois qu'il voit Nicolas."
Une histoire d'amour
Pour Nelly et son mari, il ne fait aucun doute que Mathieu connaîtra un jour son histoire, qui n'est un secret pour personne: "En fonction de sa compréhension, de son âge, nous lui raconterons petit à petit, et nous gardons un contact permanent avec toutes les personnes qui se sont occupées de lui." Des personnes qui continuent aujourd'hui à demander de ses nouvelles. "C'est vraiment une histoire d'amour au sens large, toutes les personnes qui se sont occupées de Mathieu se sont attachées à lui", confie la mère comblée. Elle ne cesse de s'émerveiller devant le petit bout de chou qui fait ses premiers pas et accourt maladroitement vers elle, pour se jeter dans ses bras. Et lorsqu'elle entrouvre la porte d'entrée pour dire au-revoir à ses invités, Mathieu fond en larmes à l'idée que sa mère pourrait s'éloigner de lui. [top]
Nagham Awada
Ouest- France
Ces Libanais contraints de se marier à l'étranger Dix-sept communautés religieuses cohabitent au Liban. Dans ce pays où le mariage civil n'existe pas, l'union de deux personnes de confession différente oblige l'une des deux à renier sa religion. L'autre solution : convoler à l'étranger. Ziad et Leila se sont mariés civilement sur l'île voisine de Chypre. C'est ainsi que Leila et son compagnon, Ziad Moussa, se sont retrouvés à la mairie d'Ayia Napa, une petite ville sur la côte Est de Chypre. Ils se sont passé la bague au doigt à 200 kilomètres de Beyrouth, sans s'unir devant Dieu, bien que croyants tous les deux. Un choix pleinement assumé : « Le mariage civil est plus moderne que le mariage religieux, estime Leila. Surtout pour les femmes musulmanes. Si je m'étais mariée selon ma confession, je n'aurais pu, par exemple, hériter que d'un huitième des biens de mon mari, en cas de décès. » Reste que la démarche du jeune couple s'apparente à un parcours du combattant. Il a d'abord fallu convaincre les deux familles. Dans un pays où tout est régi par la religion, où les traditions pèsent lourd dans la vie quotidienne, pas facile de faire passer l'idée d'un mariage non religieux. « Mon père n'était pas d'accord, au début, se souvient Leila. Il avait peur de la réaction de sa famille qui n'est pas très ouverte. » Quant aux parents de Ziad, « quoique plutôt laïcs, ils ont eu du mal à accepter cette décision. La pression sociale était trop forte ». Une fois franchi l'obstacle familial, le couple a dû affronter de longues démarches administratives. D'abord, élire un pays qui officialiserait son union. Puis se procurer des visas. Pour Ziad et Leila, Chypre représentait l'endroit rêvé. Pas trop loin, pas trop cher. L'île a, de plus, l'avantage d'être jolie, ce qui permet de jumeler mariage et voyage de noces. Les mairies chypriotes sont rodées ; le business du mariage civil y est bien huilé. A tel point que, souvent, des employés de mairie font office de témoins et de photographes des couples non accompagnés. Après avoir réuni l'argent un mariage à Chypre coûte entre 850 et 1250 € Ziad et Leila se sont envolés pour quatre jours avec les parents de la jeune femme, ses frères, les témoins et un des oncles de son mari. « Le deuxième jour, nous nous sommes présentés à la mairie à 9 h. Nous avons payé, donné nos papiers, puis nous sommes revenus à 11 h 30, en costumes, pour la cérémonie. » Elle a duré « deux minutes cinquante », sourit Leila. Simple formalité, donc. A Chypre. Mais une fois rentrés au pays, les couples mariés à l'étranger ne sont pas à l'abri de complications judiciaires. Si leur union est bien homologuée par l'État libanais, ils continuent de dépendre de la loi chypriote pour tout ce qui touche à l'héritage, au divorce... Pour mettre fin à cette situation complexe, Elias Hraoui, président de la République libanaise de 1989 à 1998, avait envisagé une loi sur le mariage civil. Son argumentaire faisait vibrer la fibre nationaliste : « Quand il y a un conflit au sein du couple, le juge applique la loi étrangère 'Au nom du peuple libanais' ! » Son projet de loi croupit toujours dans les archives de l'Assemblée. Faire glisser le mariage aux mains des autorités civiles représentait une menace pour les intérêts des chefs religieux. « Ils auraient perdu de leur influence, de leur pouvoir, analyse Ogarit Younan, sociologue et présidente du Mouvement pour les droits humains, une association libanaise qui milite pour le mariage civil. Ils auraient également perdu de l'argent car les mariages leur en rapportent beaucoup. Et puis, les extrémistes avaient peur de la laïcisation de la société. » C'est bien là le noeud du problème : pour une société où, depuis 1936, chacune des dix-sept religions applique sa propre loi et possède ses propres tribunaux, la pilule est dure à avaler. Ziad et Leila reconnaissent que leur démarche s'apparente à « un acte militant ». Ils habitent Beyrouth, gagnent correctement leur vie, fréquentent des milieux intellectuels : c'est le profil type de ces 'mariés de l'exil' dont le nombre est impossible à connaître. Une prise de distance vis-à-vis de leur culture familiale qu'ils continuent d'assumer dans le mariage : Ziad et Leila s'étaient mis d'accord pour donner à leur premier enfant un prénom ni chrétien ni musulman. « Quand nous avons appris que Leila attendait un garçon, nous avons décidé qu'il s'appellerait Ramzy, se rappelle Ziad. Ma mère a fondu en larmes parce que, dans la tradition chrétienne orthodoxe, le premier bébé doit porter le prénom de son grand-père. Après de longues discussions, elle m'a convaincu de l'appeler Georges. Il a ensuite fallu convaincre Leila qui, à son tour, a fondu en larmes... comme ses parents. » Dans quelques jours, le petit Georges devrait ouvrir les yeux sur un monde bien compliqué : « Quelle histoire absurde pour nommer un nouveau-né ! » BEYROUTH (correspondance). « Je suis musulmane, il est chrétien ; pour l'épouser, j'aurais pu me convertir à sa religion, mais je n'étais pas prête pour ça. » Leila, 33 ans, résume en une phrase le problème qui se pose aux couples mixtes au Liban. Le simple mariage civil n'existant pas au Pays des cèdres (pas plus, d'ailleurs, qu'en Israël ou en Syrie, ses voisins), l'alternative est simple : soit l'un des deux adopte la religion de l'autre, soit les futurs époux optent pour le mariage civil dans un pays où la loi le permet. | |||